L’année 2012 sera My Bloody Valentine ou ne sera pas ! Le groupe irlandais de Kevin Shields, qui a fait exploser le « shoegazing » à la toute fin des années 80 et au début des 90’s, va voir ses deux albums et quatre EP réédités et remasterisés par Kevin Shields lui-même, à l’occasion des vingt ans de la sortie de Loveless (sorti à la fin 1991), leur album fondateur. C’est donc cet album, mais aussi Isn’t Anything? (paru en 1988) qui reviendront hanter les oreilles des fans de la première heure, et très certainement générer un nouveau vivier de fans, tant leur jusqu’au-boutisme musical devrait encore résonner vingt ans plus tard.

My Bloody Valentine a marqué le rock alternatif britannique et mondial dès la deuxième moitié des années 80. Le groupe se forme à Dublin (Irlande) sous l’égide d’un musicien à la vision et à la sensibilité musicale bien particulières, Kevin Shields. Celui-ci enrôle Bilinda Butcher, une chanteuse et guitariste tout aussi libre que lui dans son approche musicale. Les deux embauchent d’autres musiciens et tirent leur nom d’un film, Meurtres à la Saint-Valentin de Paul Zaza, un film d’horreur canadien de série Z datant de 1981.

D’abord porté par des petits labels locaux, puis par le fameux Creation Records, écurie ultra-créative et novatrice d’Alan McGee, découvreur de talents hors-pair, le groupe se lance, paré de ses influences allant de Sonic Youth au Velvet Underground en passant par The Jesus & Mary Chain. My Bloody Valentine sort un EP en 1988, intitulé You Made Me Realise, qui les mettra au premier rang d’une scène rock alternative florissante, usant de la distorsion à la guitare comme on torture du matériel. Dissonances contrôlées, chansons déstructurées, voix fantomatique de Bilinda Butcher et Kevin Shields, et mélodies pop seront la marque de fabrique de My Bloody Valentine. Cet EP sera suivi par un autre, Feed Me with Your Kiss, qui posera les bases du premier véritable album pour le groupe, Isn’t Anything?, qui sort quelques mois plus tard. Le groupe est alors bel et bien lancé.

Avec My Bloody Valentine, il s’agit avant tout de créer une atmosphère planante, entre bruitisme et onirisme. Loin de s’engouffrer dans la brèche trop facile du sempiternel couplet/refrain, le groupe préfère transformer l’inaudible en grâce, l’atrocité auditive d’un larsen en mélodie du bonheur. Le label Creation ne s’y trompera pas. C’est sous la houlette d’Alan McGee que sortira le deuxième opus de My Bloody Valentine à la fin de l’année 1991. Loveless et ses titres « When You Sleep », « Only Shallow » ou « Loomer » propulsent directement le groupe dans la sphère des combo qui comptent. Arty à souhait, évanescent, étrange et subversif, la bande emmenée par le mystérieux Kevin Shields fait la Une de toutes les revues spécialisées, et emboite le pas à d’autres formations qui tentent de prendre le train en marche, comme Lush, Ride ou Slowdive, qui eux aussi se voient étiquetés groupes de « shoegazing » (en raison du regard porté sur leurs chaussures pendant leurs concerts…) par la presse spécialisée, totalement séduite par ce courant musical.

Puis les relations entre le groupe et son label de l’époque s’enveniment quelque peu, en raison notamment du temps pris pour enregistrer Loveless et des coûts pharaoniques que celui-ci aura finalement engendré. Le retour sur investissement est pourtant bel et bien là : Loveless, encensé par la presse musicale mondiale (le classant souvent parmi les meilleurs disques de la décennie en cours…) fera grimper les ventes de manière conséquente.

My Bloody Valentine se murera ensuite dans le silence, Kevin Shields évoquant tout de même fréquemment (tous les six mois, à vrai dire !) l’éventuelle reformation du groupe. Puis la bande se réunit finalement en 2008 pour une grande tournée en Europe, au Japon et aux Etats-Unis, après quelques collaborations, avec Primal Scream notamment. Le groupe parle de plus en plus d’une reformation. Celle-ci deviendra quasiment officielle en 2012, quand le génial leader du groupe annonce l’enregistrement d’un nouvel opus, qui doit sortir peu après les rééditions de Isn’t Anything? et Loveless et des quatre EP du groupe : Feed Me With Your Kiss (1988), You Made Me Realise (1988), Glider (1990) et Tremolo (1991). Ces quatre disques sont regroupés sur la compilation EP’s 1988-1991. L’occasion d’une belle séance de rattrapage pour qui serait malencontreusement passé à côté de ce groupe fondateur, qui aura influencé une bonne partie des groupes de rock des années 90 et 2000…